Pour l’inauguration de l’exposition Evangelion et les sabres japonais, la MCJP avait eu la bonne idée d’organiser une démonstration de gravure sur lame de sabre.
Maître Munenori Kinôshita, est né en 1968 à Okayama, et exerce depuis plus de vingt ans sous le nom d’artiste “Soufu Kinoshita”.

Aujourd’hui maître Kinoshita, l’un des cinq dernier kinkôshi (graveur sur lame) du Japon, va façonner un dragon.

Une croyance ancestrale raconte que les démons (oni), responsables des maladies, prennent peur en voyant leur reflet dans la lame du sabre, et s’enfuient ! Posséder un sabre reviendrait donc à repousser les démons.

Au Japon le dragon est un symbole de divinité, en effet c’est le seul “animal” à pouvoir naviguer entre le ciel et la terre, le monde des hommes et celui des dieux.
On distingue deux sortes de dragons, ceux qui montent de la terre vers le ciel (nobori-ryû) et ceux qui descendent du ciel vers la terre (kudari-ryû).

Il faut savoir que la coutume de faire graver son sabre remonte à l’époque des guerres de clans.
En effet, à cette époque on pensait que graver un nom ou une représentation de divinités décuplait la force de l’arme, ce qui en faisait une protection encore plus efficace.
A cette époque coexistaient également des sabres dits rituels, bien plus travaillés que les sabres utilisés en combat, et sur lesquels pouvait se trouver gravé une prière.
Le sabre pouvait aussi avoir une fonction d’apparat, servant à affirmer la supériorité d’un chef de clan. A cette époque un sabre de grande qualité avait autant de valeur qu’un territoire.
Aujourd’hui encore le sabre reste un symbole fort, et l’on peut voir l’Empereur en porter un à sa taille lors des cérémonies officielles.

Pour réaliser le motif, Mr Kinoshita utilise la technique traditionnelle dite wabori, qui consiste elle à graver vers soi, et non vers l’extérieur comme le préconise les méthodes classiques de gravure. La raison de cette particularité est simple, c’est la dureté de la lame qui rend les mouvements habituels impossibles

Mr Kinoshita travaille à l’aide de petits burins et d’un maillet. Il faut déjà deux ans d’apprentissage pour apprendre à aiguiser son burin, plus encore cinq autres années de formation pour la gravure.

L’apprentissage pour devenir kinkôshi est exigent, mais c’est parce que la graveur a une lourde responsabilité sur les épaules.
En effet la fabrication d’un sabre japonais est une oeuvre collective, qui fait appel à divers corps d’artisanat, entre autres :
tôsho (forgeron)
togishi (polisseur)
sayashi (fabricant de fourreau)
tsubako (fabricant de garde)
nirishi ( laqueur)

Le graveur intervient en dernier lieu. Afin de ne pas gâcher la lame, les matériaux nobles utilisés et le travail de ses confère, il doit donc faire preuve d’un grand savoir-faire et de beaucoup de concentration.

Actuellement au Japon, il ne reste que cinq graveurs en activité pour 250 forgerons. Mr Kinoshita, inquiet quand à l’avenir de sa profession, cherche donc un apprenti, quelle que soit sa nationalité. Lorsque l’on demande à celui-ci quel sont les qualités primordiales pour effectuer ce métier, il répond très sérieusement qu’il faut être capable de rester assis plus de huit heures consécutives, et que si l’on est moins doué qu’un autre ce n’est pas grave il suffit juste de s’entraîner encore plus afin de progresser… une réponse typiquement japonaise !


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